Louis Doré (1666)

Louis est le premier à s'installer définitivement au pays. Il est le fils de Pierre et de Hilaire Fergé, de Vivier-Jusseau, actuellement de la commune de Chives en Charentes-Maritime. Il arrive en Nouvelle-France le 11 août 1666 à bord du navire le Saint-Jean-Baptiste. Il s'était embarqué à La Rochelle le 17 mai. Né vers 1636, il épouse à Québec, le 1er septembre 1670, Jeanne Dufossé (fille du Roy), fille de feu Vincent Dufossé et de Noëlle Desnoyers de la paroisse Saint-Léger de la ville et évêché d'Évreux en Normandie.

par PAUL-ÉMILE DORÉ

L'humble maison de l'habitant

En 1669 Louis reçoit une concession dans la Seigneurie de Maure et s'établit à la Rivière-aux-Roches, Saint-Augustin de Demaures, où il devait passer sa vie comme ses fils Pierre-Louis et Étienne. Le contrat de concession fut passé devant le notaire Gilles Rageot. Une maison familiale sise sur la terre de Louis appartenait toujours à l'un de ses descendants jusqu'à ces dernières années.

Louis est décédé à l'Hôtel-Dieu de Québec le 9 novembre 1696 après avoir été hospitalisé pour une période de neuf jours. Jeanne Dufossé fut inhumée le 7 novembre 1698 à Neuville.

Louis et Jeanne étaient à l'aube de la trentaine quand ils se sont mariés. Ils ont donné naissance à six enfants :

Pierre-Louis né le 28 août 1671 épouse Catherine Coquin, à Pointe-aux-Trembles de Québec, le 24 novembre 1699. Il décède à Saint-Augustin-de-DesMaures le 15 juillet 1744. Le couple donne naissance à 16 enfants: Louis, 1701; Nicolas, 1702; François, 1704; Marie Anne, 1706; Jean-François, 1707; Marie Geneviève, 1709; ierre, 1711; Étienne, 1712; Louis-Joseph, 1714; Marie Louise, 1715; Joseph, 1717; Claire et Catherine, jumelles décédées le jour de leur naissance, 1719; Ignace, 1721; Marie-Charlotte, 1723; Marie Angélique, 1725. Cette dernière se fit religieuse chez les Sœurs de la Congrégation de Notre-Dame de Montréal.

Parmi les descendants de Pierre-Louis et de Catherine se retrouvent les trois Doré patriotes morts à la bataille de Saint-Eustache, en 1837.

Marie-Madeleine, née le 24 août 1673, épouse Blaise Dumareil, fils de Toussaint et Catherine Chevreil de France, le 21 février 1689 à Pointe-aux-Trembles. Elle décède le 11 octobre 1694 à Château-Richer. Elle donne naissance à deux enfants, Magdeleine et Florent.

Jeanne-Angélique née le 16 avril 1676 épouse Antoine Lemarié, fils de Jacques, fermier, et de Marie Morin, le 12 octobre 1699 à Saint-Augustin-de-Desmaures. Elle donne naissance à une fille, Jeanne-Angélique, le 2 août 1700, paroisse de Saint-Augustin, et décède le lendemain 3 août des suites de l'accouchement.

Françoise née le 16 avril 1678 à Québec épouse Jean Gagnon (né le 26 avril 1659), fils de Robert et Marie Parenteau, le 4 novembre 1718 à Notre-Dame de Québec. Jean était père 13 fois d'un premier mariage. Ce second mariage fut sans postérité. Françoise décède le 10 décembre 1748 à Rivière-Ouelle et Jean le 17 février 1742.

Étienne est né le 9 février 1680 et a été baptisé le 11 février suivant à l'église de Dombourg. Le 6 février 1720 (plutôt le 16 selon des auteurs), il épouse Louise Pluchon (Aubuchon) qui décède quatre mois plus tard, soit le 4 juin 1720.

Il se remarie en 1723, le 12 avril, à la Pointe-aux-Trembles, avec Charlotte Maurissette, fille de Mathurin Maurisset et d'Élisabeth Coquin dit Latournelle. Le couple donne naissance à 11 enfants : Étienne 1724, Charlotte, 1726; Louis-Joseph, 1728; Jean François, 1729; Augustin, 1730; Françoise, 1732;34; Joseph, 1735; Michel, 1737; Thérèse, 1739; Jean-Baptiste, 1741.

Étienne décède en 1742 alors que le dernier-né a un an. Il faut dire qu'Étienne s'est marié assez âgé avec une jeune femme, sa cadette d'au moins vingt ans.

Michel est le sixième enfant, né à Neuville le 6 octobre 1682 et baptisé le 20 octobre suivant. Ses parrain et marraine sont Michel Deserre et Geneviève Boutin. Michel est resté célibataire. On retrouve son nom au « Palmarès de la longévité au Québec ancien », une étude signée Hubert Charbonneau, une autorité en matière de démographie. L'article contient une liste des nonagénaires du 18e siècle où apparaît Michel qui, a son décès, a 93 ans, 7 mois et 9 jours.

Au Québec, les descendants de Louis Doré et Jeanne Dufossé se retrouvent dans les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de Québec, des Laurentides et à Montréal. Plusieurs ont migré vers les provinces anglaises et quitté le pays pour les États-Unis. Quelques lignées ont modifié l'orthographe du nom (Dauray et D'Auray pour en nommer deux), particulièrement dans la grande région montréalaise.

Un peu d'histoire

Nos ancêtres signaient des contrats, c'est bien connu. Le contrat de mariage avant de passer chez le curé était la coutume, ce qui le validait. Jeanne Dufossé, fille du Roy, en a signé trois : un premier avec André Gariteau le 7 octobre 1669, un deuxième avec Pierre Buteau le 15 avril 1670 et un troisième avec Louis Doré le 9 août 1670. Le premier septembre 1670, quatre couples se présentent devant le curé de la cathédrale de Québec, dont Louis Doré et Jeanne Dufossé. Jeanne était donc fixée dans son choix, l'élu de son cœur sera Louis l'ancêtre de Doré.

Un deuxième contrat concerne la concession obtenu par Louis devant le notaire Gilles Rageot le 10 août 1669, dans la Seigneurie de Maure (Rivière aux Roches), où il passa sa vie ainsi que ses fils Pierre-Louis et Étienne. Quelques années plus tard, soit le 14 octobre 1675, il achète la concession que François Caron, un ami semble-t-il, avait obtenu le même jour que lui, mais qu'il avait vendu à Sibard Courraud de la Coste (de Beaupré probablement). Ces deux concessions étaient voisines et resteront dans la famille Doré pendants deux siècles.

Il existe deux autres contrats, passés devant le notaire royal Raymond Becquet, où apparaît le nom de Louis Doré. Le premier est un bail où Louis loue une vache de Louis Sédillot pour une période de deux ans au prix de vingt-cinq livres. Ici il faut se mettre en contexte. On est le 29 juin 1671 et Pierre-Louis, l'aîné de la famille, naît le 26 août 1671, soit un an après le mariage de ses parents.

On peut penser que la vache était devenu indispensable vu la naissance de Pierre-Louis deux mois plus tard. Les bébés ont toujours eu besoin de lait. Il est fort probable aussi que la vache donnera des veaux au cours de ces deux années, ce qui constituera la base d'un troupeau. Et Pierre-Louis aura eu un bon départ si on en juge par sa nombreuse postérité. La location était probablement plus accessible que l'achat.

Mais un autre aspect est intéressant. De quelle race était la vache louée par Louis? Au début de la Nouvelle-France, entre 1608 et 1610, les bovins, provenaient de la région de la Normandie en France. Par la suite des importations successives d'animaux ont été effectuées à partir de la Bretagne et de la Gascogne. Il semblerait que c'est à partir de tous ces animaux que c'est formée la « Canadienne », ou « Canadienne noire » ou « Canadienne française ». Avec le temps elle a pris une apparence et une conformation propre. Et pendant deux siècles elle sera l'unique vache au Québec. En 1850, le Parlement canadien a été avisé que les bovins de race Canadienne étaient les seuls au Québec, sauf pour quelques troupeaux d'Ayrshire et Shorthorn.

Actuellement l'Association des éleveurs de la race Canadienne précise sa vocation et défend son utilité et s'en fait l'intelligente défenderesse. Il est permis de penser qu'elle ressemblait aux animaux qui apparaissent sur la photo ci-bas.

Le deuxième contrat se rapporte au défrichement de la terre du Sieur de la Chevrottière, François de Chavigny Escvuyer. Louis Doré et François Dupuis s'engagent à « abattre, débitter, brusler & nettoyer neuf arpents de bois au lieu qui leur sera judiqué par led Sieur de la Chevrottière sur sa terre & Seigneurie de la Chevrottière… » Ce travail est fait pour la somme de trois cent vingt-quatre livres, à raison de trente-six livres par arpents. Et voilà pour les contrats de Louis Doré (1666).

La Canadienne est la seule race de bovins développée en Amérique du Nord à partir d'animaux importés de Bretagne et de Normandie au tout début de la Nouvelle-France.

Un village d'Angoumois, le Vivier-Jusseau

Le Vivier-Jusseau, pays de Louis Doré (1666), fait partie de la commune de Chives, qui comprend le bourg, quatre villages y compris Vivier-Jusseau, cinq hameaux, quelques fermes et maisons isolées. Sa superficie globale est de 2044 hectares.

Un ruisseau, le Gazon, parcourt la commune. Au Vivier, il se divise en plusieurs branches, et est alimenté par plusieurs sources dont la plus importante est à Jusseau.

Ce ruisseau joua un grand rôle dans l’économie de cette commune au cours des siècles. Il y a 200 ans, il faisait tourner trois moulins dont un à Vivier. Sous l’effet des éléments, il s’est modifié avec le temps puis est disparu en poursuivant sa course sous terre.

L’histoire de la commune remonte aux Romains. Sur la voie romaine Aulnay et Ruffec s’élevait une agglomération assez importante là où est Chives aujourd’hui. Vivier-Jusseau existait au Moyen-Âge et avait son château que les propriétaires abandonnèrent pour s’installer au «Logis» actuel. C’était un château-fort entouré de hautes murailles crénelées et pourvu de mâchicoulis. Une enceinte de 2 ou 3 rangées de douves rendait le château inabordable. Le pont-levis situé en face de l’enceinte murée était renforcé par une herse. L’emplacement de ce château est toujours visible, ainsi que celui d’autres constructions.

Vivier Jusseau

Quelques bâtiments très anciens, qui auraient pu appartenir aux ancêtres Doré existent encore et sont entretenus et occupés; ils ont connus des modifications et réfections importantes. Les propriétaires actuels (en 2004) sont Annie Bourdier et Pierre Boitet, son époux. Leur porte était ouverte aux Doré. Avant la Révolution, le Vivier-Jusseau était le seul centre commercial de la région. Il s’y tenait, de temps immémorial, huit foires par an et un marché par semaine. Après la Révolution, ces foires et marchés qui avaient cessé d’opérer furent rétablis à raison de 12 foires par an, le 4 de chaque mois, puis abolis. Les halles furent démolies en 1810.

Impasse Doré au VIVIER JUSSEAU

Les armoiries des Seigneurs du Vivier-Jusseau apparaissent dans l’église de Chives où elles ont été mises à jour lors de la réfection de celle-ci en 1990. L’église de Saint-Julien de Chives a la forme d’une basilique romane. Elle appartient à deux époques : la nef unique se rattache au XIIe siècle, le transept et le chœur sont du XIVe siècle. Cette église était autrefois entourée d’un cimetière. Des personnages important furent enterrés dans et sous l’église, dont un en 1666, que Louis Doré a peut-être connu.

Rue du Québec au VIVIER JUSSEAU

L’économie de cette grande région repose sur l’agriculture, le tourisme et l’industrie vinicole. Au «Logis » du Vivier, un agriculteur pratique l’élevage de vaches limousines et la région est dotée d’une coopérative agricole importante reliée à un ensemble encore plus vaste. Près de cette coopérative se trouve le lieu-dit «Chez Doré ».

La commune des Chives est à la limite des trois départements suivants : la Charente, la Charente-Maritime et Deux-Sèvres. Le Vivier-Jusseau est à la jonction des routes D132 et D225E3.

Le coin des deux rues, VIVIER JUSSEAU